Cette cinquième cré-action de l’année nous a emmenés au zoo ! La compagnie de nuit comme de jour menée par Guillaume Beguin nous y présentait une gorille des plaines, prénommée Catherine, des plus troublantes…

Au fond du zoo du Bois du Petit-Château, dans l’enclos des lynx, partagé en deux pour l’occasion, afin que Catherine n’ait pas à en découdre avec un lynx mâle veuf, un peu esseulé dans l’attente de sa future compagne (nous l’avons d’ailleurs trouvé très attentif à ce qui se passait, ainsi que monsieur le cerf, juste en face, qui a fait retentir son brame en plusieurs occasions comme pour réclamer sa part d’attention), bref, dans l’enclos des lynx, vers la fin de l’après-midi, ce pensionnaire très spécial a intrigué une foule de spectateurs.
Il y avait tous ceux qui passaient là par hasard, en famille, ignorants de la performance, et découvraient un gorille aux attitudes plus vraies que nature, dont même le regard semblait dégager cette mystérieuse mélancolie toute animale. Et on pouvait entendre leurs murmures, leurs interrogations, leurs débats : « mais si c’est un vrai » « mais je sais pas » « enfin regarde, c’est pas une vraie fourrure ». Il y avait les parents qui essayaient de faire marcher leurs jeunes enfants – ceux qui font encore croire au Père Noël, ceux qui soudainement surpris s’exclamaient « Ah ! mais c’est quoi ça ?! C’est pas un vrai ! Il m’a bien eu ! Ce que c’est fort ! Mais quelle idée ! » Il y avait encore les ados avec leur regard typiquement affuté et désabusé : « Bon, passe encore que vous traîniez des heures devant les enclos, mais au moins que ce soit devant de vrais animaux ! »

Et oui, Piera Honegger alias Catherine a suscité nombre de réactions. Son incarnation physique, comportementale, gestuelle de l’animal était déroutante. L’illusion était si présente que lorsqu’elle s’est mise soudainement à haranguer la foule : « Dis donc, tu pourrais me regarder quand je te parle ! », le trouble était encore plus grand ! Le tour de force de la performance était de réussir à sans cesse jouer avec cette double identité homme-singe et à la rendre toujours plus intrigante. Avez-vous déjà vu un gorille s’asseoir en croisant les jambes comme une demoiselle ? Et le striptease, la lente mise à nu du gorille, la révélation des dessous du costume, son faux ventre et le crayon noir sur les yeux, la paire de leggings improbable comme tout droit sortie de disco émanant des entrailles de la bête, la femme à tête de gorille… ce striptease était un pur morceau d’anthologie.

Un petit garçon est allé saluer l’artiste à la sortie de son enclos, tout intimidé, il a osé poser sa question : « Mais pourquoi tu fais semblant d’être un singe ? »
– « Pour voir ce que cela fait ! »