Nathalie Bähler Hynek était au concert d’Ibrahim Maalouf jeudi dernier au Théâtre.Voici sa contribution…

Ecoute … : Un aéroport. Quelque part. 
Respire l’odeur écoeurante du kérosène  !
Ressens-tu le froid des néons ? Le froid des murs vides ? Noir. Blanc
Décollage. Et soudain, les couleurs du monde explosent.

Le rouge d’un Orient en conflit éternel, hésitant entre guitare et piano.
Le pourpre d’une robe qui se gonfle, tournoie, retombe, laissant entrevoir les jambes d’une petite fille qui deviendra femme.
L’or d’une mosquée d’Istanbul et le chant qui s’en échappe en arrachant les derniers lambeaux de nuit. 
L’ocre des murs du Caire qui s’étale et s’en va se déverser avec le Nil, plus au nord.
Le vert tendre  qui traverse le métal d’une trompette avec humour.

Et le bruit du soleil qui se lève sur Nouakchott. Fracassant. Intense. Brûlant.
La brutalité soudaine d’un combat. Tu l’entends, ce bruit ? Tu l’entends ?
La douce musique de la nuit sur Beyrouth, si calme, qui s’envole, s’emmêle, fait rougir la lune, embrasse le ciel poudré d’étoiles. Ce murmure qui éclate encore et encore.

Et la lumière bleue d’un son qui se tord, qui s’entête, qui pleure et qui disparaît ? 
Ce son sublime, hésitant entre Orient et Occident, qui t’emmène, te promène.
Ce son qui se fait volubile, curieux, rieur et qui, d’une pirouette, te lâche là où tu n’avais pas imaginé aller ?
Ce son flamboyant, qui te caresse, qui embrase tes oreilles ? Ce son qui s’appelle Ibrahim Maalouf.